Histoire des forêts françaises – De la Gaule chevelue à nos jours
Le manteau forestier de la Gaule s’est rétréci en deux millénaires, notamment lors des grands défrichements du IXe au XIVe siècle, avec des fluctuations liées aux famines ou aux pestes, sortes de respirations avec les surfaces agricoles. Au début du XIXe siècle, la forêt connaît un point bas, avec une prise de conscience de devoir la protéger. Sa renaissance débute avec Louis XVIII et la création, en 1824 à Nancy, de l’École royale forestière, et la rédaction du Code forestier de 1827. Premier propriétaire forestier grâce aux donations des pénitents, le clergé a eu une grande importance. Avec celles de la Couronne, ces forêts ecclésiastiques, nationalisées à la Révolution, devinrent nos forêts domaniales. Quant aux forêts communales, leur histoire remonte aux « forêts des communautés » du Moyen Âge. Les communautés y bénéficiaient aussi de droits d’usages : parcours du bétail, ramassage de fougères, de mort-bois. Pour purger les forêts de ce désordre, le cantonnement, transformation en vrai droit de propriété concentré sur une petite partie, déjà prévu en 1669, fut repris sous Napoléon III et constitua de petites forêts communales, en périphérie des grandes domaniales. Depuis 1830, la forêt a doublé sa superficie, et son capital – volume et carbone stocké – n’a cessé de progresser avec la conversion des taillis en futaie. Lancé sous Napoléon III, la Restauration des terrains en montagne (RTM) a marqué nos paysages avec 400 000 hectares de reboisement. De même, de Gaulle lança en 1946 le Fonds forestier national (FFN), reboisant plus d’un million d’hectares. Ce remarquable instrument de politique forestière a hélas été supprimé en 2000 et les replantations ont chuté. L’industrie en aval va manquer de bois résineux qu’elle demande… et qui manquent déjà. Les glaciers fondent, le niveau des océans monte. Face au réchauffement climatique et aux évolutions du monde, les experts redécouvrent les bienfaits de la forêt et du bois, et partout appellent au reboisement. L’homme réalise soudain qu’il a trop défriché. Mais en France, depuis déjà deux siècles, la forêt progresse.
Jean-Marie Ballu, IGPEF honoraire
Agronome et ingénieur général honoraire des Ponts des Eaux et des Forêts, Jean-Marie Ballu a fait une grande partie de sa carrière à l’Office national des forêts avant de la terminer comme président de la section "nature, forêt, paysages" du ministère de l’Agriculture. Il a écrit Bois de marine, ouvrage primé par l’Académie de Marine en 2001 et Bois d’aviation, prix du Livre aéronautique et Prix des Ailes 2014 (Toulouse, Aérospatiale, France Bleu). Dans le domaine historique, il a aussi écrit l’Hermione, primé en 2015 par l’Académie des sciences, arts et belles lettres de Bordeaux, et tout récemment, comme pilote et co-auteur, avec G. Huffel et G.-A. Morin, Histoire des forêts françaises, de la Gaule chevelue à nos jours